in

Les questions LGBT au sein de la campagne législative

Les élections législatives auront lieu les 10 et 17 juin prochain. Des candidatures LGBT sont connues : le candidat PS-PRG à Poissy (78), Eddie Aït, conseiller régional d’Ile-de-France et vice-président d’Elus Locaux Contre le Sida ; Camille Barré, candidate trans’ du PCF dans les Hauts-de-Seine ; Philippe Meynard, candidat du MoDem/UDF en Gironde et maire de Barsac et Pierre Serne, co-animateur de la commission LGBT des Verts et candidat dans la 6ème circonscription du Val de Marne.

Nous avons voulu faire un coup de projecteur sur deux autres candidatures. Celle qui s’annonce vive de Martine Billard, peu médiatisée mais très prolixe députée sortante qui souhaite de nouveau siéger à l’assemblée et qui se présente dans sa 1ere circonscription de paris qui regroupe les quatre premiers arrondissements de la capitale. Bibliothécaire de formation, mariée et mère de famille, Martine Billard a été l’une des plus actives à l’assemblée sur les questions LGBT. L’autre candidature se situe à Avignon avec Marie-Paule Lolo, également membre des Verts, qui concourt dans la circonscription du Grand Avignon dans le département de Vaucluse. Psychothérapeute, âgée de 36 ans, elle vit dans une commune rurale de 6 000 habitantEs, co-anime la commission LGBT des Verts. Militante LGBT, elle fut présidente des Universités d’Eté Euroméditerranéennes des Homosexualités (UEEH).

Nous souhaitions à travers leurs témoignages voir à la fois leurs vision des thèmes LGBT comme sujet de campagne pour ces législatives mais aussi leur demander quelle perception elles ont de l’appréhension de ces thèmes par leur électorat en circonscription, l’une au sein de Paris, l’autre en province.

CitéGAY : Martine Billard, on vous sait très impliquée sur les questions LGBT à l’assemblée, pour rappel quelles ont été justement vos actions sur ces sujets ?


Martine Billard : Tout au long de la législature 2002-2007, j’ai utilisé les divers outils d’interventions parlementaires pour porter les questions LGBT à l’Assemblée : propositions de lois spécifiques, amendements sur d’autres lois, questions au Gouvernement, communiqués de presse. Dans ce domaine, mon bilan est assez dense : Proposition de loi tendant à permettre aux couples non mariés d’adopter conjointement un enfant, prévoyant l’homoparentalité (juillet 2002), proposition de loi pénalisant les propos discriminatoires homophobes, lesbophobes et transphobes (mars 2003), questions écrites, interpellations en séance, intervention et amendements pour améliorer la HALDE, répliques contre les propos homophobes du député Vanneste en séance, amendements sur la Loi Fillon sur l’école pour introduire la prévention contre les discriminations homophobes et transphobes parmi les objectifs scolaires (février-mars 2005) etc etc etc

CitéGAY : Marie-Paule Lolo, on vous a connu comme présidente des UEEH, votre engagement politique est-il la continuité de votre engagement associatif LGBT ?

Marie-Paule Lolo : En fait, mon histoire est inverse. Je suis militante politique depuis l’âge de 14 ans. Ma mère déjà m’emmenait enfant tenir les bureaux de vote avec elle. J’ai par contre adhéré au parti Les Verts à la suite de rencontres dans le milieu associatif. D’ailleurs, lorsque j’étais présidente des UEEH, je n’avais aucun rôle politique visible, c’était un engagement personnel. Par contre, mon utopie politique m’a très tôt amenée à m’investir dans des associations. En effet, lorsque le service public ne fait pas son ouvre c’est-à-dire lorsque le politique exclut, par exemple, du champ de l’éducation citoyenne certaines communautés, il est primordial de soutenir les ONG dans leurs efforts. Cela m’a valu de nombreuses tribulations car il existe une sorte amour/haine entre les politiques et les associations.

CitéGAY : Sur les questions LGBT justement, pensez-vous que le clivage gauche-droite demeure ?

Martine Billard : Bien sûr que le climat gauche/droite perdure sur les questions LGBT, et ce malgré l’évolution de l’opinion publique qui s’est révélée moins rétrograde que nombre des caciques de droite. Durant la législature 2002-2007, nous avons obtenu quelques avancées sur la lutte contre les discriminations en général, et contre l’homophobie en particulier (création de la HALDE, pénalisation des propos discriminatoires homophobes et sexistes). Cela dit, à chacun de ces débats, on a trouvé sur les bancs de l’UMP et parfois même de l’UDF des députés exprimant les orientations homophobes de la vieille droite réactionnaire qui n’ont pas disparu. Les débordements verbaux de Vanneste sont révélateurs, et le fait qu’il soit maintenant reçu par François Fillon et soutenu par l’UMP pour sa réélection montre que la droite n’est pas au clair y compris sur la lutte contre l’homophobie. Et encore faut-il relativiser les dernières avancées : manque de moyens pour la Halde, manque de volonté pour mener des actions de prévention contre l’homophobie à l’école, en agréant par exemple des associations spécialisées. En revanche, la droite refuse viscéralement l’égalité des droits : ouverture du mariage aux personnes de même sexe, homoparentalité, alors que toute la gauche y est maintenant favorable. Et même sur le PACS, nous n’entendons jamais la droite défendre l’extension des droits aux pensions de réversion, ni même l’égalité des droits des étrangers dans les couples binationaux (obtention des visas, des titres de séjour et de la nationalité). Et sur les questions des personnes transgenres et transexuelLEs, c’est le silence total du côté de la droite : refus de la dépsychiatrisation, refus la lutte contre la transphobie et contre les discriminations légales à leur encontre (problèmes administratifs, documents d’identité). Le clivage droite/gauche n’est pas prêt de disparaître.

Marie-Paule Lolo : Plus que jamais ! Les propositions qui émergent de la majorité présidentielle ou de son ancien allié, l’UDF-Modem, se détachent clairement de l’égalité des droits. On ressort des placards une vieille proposition de loi déposée en 1992, le C.U.C, pour tenter de démontrer la sortie du conservatisme de la droite ou du centre droit. Nous sommes en pleine régression ! Ces deux courants de pensée proposent d’inscrire dans la loi une différence entre les couples hétéros et les couples homos. Le pacs, au moins, a le mérite de s’adresser à tout le monde. En matière d’homoparentalité, aucune reconnaissance n’est proposée, le centre-droit propose une adoption simple qui, à la mort du conjoint-e « géniteur-génitrice », pourra être présentée au législatrice-teur. L’adoption et la PMA sont totalement écartées du champ. Ce qui me met encore plus en colère, c’est le silence destructeur qui entoure les revendications des personnes Trans’. Les couples d’homosexuels et de lesbiennes sont sous-catégorisés tandis que les personnes Trans’ sont totalement niées. Il est triste de constater que notre paysage politique s’éloigne de plus en plus de la convention des droits de la personne humaine.

CitéGAY : En quoi les Verts se démarquent ils des autres formations politiques sur les questions LGBT?

Marie-Paule Lolo : Je pense que ma réponse à la question précédente éclaire déjà sur notre différence par rapport à la droite et au centre-droit. Concernant la Gauche, le paysage politique a beaucoup changé depuis moins de 6 mois. Les présidentielles ont amené les partis de gauche (PS, PCF) à reprendre les revendications des associations LGBT en matière de Droits, Les Verts et la LCR les ont inclus dans leur programme depuis longtemps. Les Verts évoluent depuis longtemps avec la société. Nos questionnements ne se rythment pas avec le calendrier électoral. (…)

CitéGAY : Les Verts sont historiquement très engagés sur ces questions, l’êtes vous également localement sur ces sujets durant votre campagne ?

Martine Billard : Oui bien sûr. Le 28 mai, avec mon suppléant Pierre Aidenbaum (maire socialiste du 3ème arrondissement), j’ai organisé un apéro-débat sur les questions LGBT au restaurant Le Starcooker au coeur du Marais, rue des Archives, dans la 1re circonscription de Paris où je suis députée. J’ai reçu le soutien de Noël Mamère, Louis Georges Tin (initiateur de la Journée mondiale contre l’homophobie IDAHO), du philosophe Didier Eribon, d’Eric Garnier (co-président de l’APGL), de Jacky Fougeray (Illico), Pascale Ourbih (comédienne transgenre) et de nombreux responsables politiques locaux (PS, PRG et Verts). J’ai promis que si j’étais réélue, je créerais avec d’autres collègues députés un intergroupe à l’Assemblée nationale sur les questions LGBT – sur le modèle de celui du Parlement européen -, chargé notamment d’harmonier par le haut le statut des couples de même sexe des différents pays de l’Union européenne. De plus en plus de nos voisins européens ont déjà ouvert le mariage ou l’adoption aux couples homosexuels : les droits de leurs ressortissants doivent être reconnus et protégés s’ils décident de s’installer en France car les différences de droits entre pays de l’Union européenne provoquent des situations inextricables. Cet intergroupe parlementaire que je propose de constituer pourrait également traquer tous les débordements homophobes qui résonnent trop souvent encore dans l’Hémicycle. Par ailleurs, les questions LGBT sont présentes comme une thématique à part entière dans ma campagne locale, notamment dans ma profession de foi et ma brochure programmatique distribuées dans toutes les boîtes aux lettres des électeurs de ma circonscription.

Marie-Paule Lolo : Bien sûr, je suis une femme « entière » et engagée. Lorsque je parcours ma circonscription, des quartiers résidentiels aux quartiers populaires, mes propositions sont les mêmes. Un sol pour toutes et tous est une idée qui traverse nos concitoyennes-s, l’égalité de traitement aussi.

CitéGAY : Comment réagit la population de votre circonscription quand vous abordez la thématique LGBT ?

Martine Billard : Lors de mes initiatives propres sur la thématique LGBT, j’ai des retours très chaleureux en circonscription, sur mon bilan fourni sur le sujet et ma présence continue aux côtés des associations. D’une façon plus générale, l’évocation de ces thématiques n’éveille pas d’animosité particulière de la part des électeurs, signe, je l’espère, de l’évolution des mentalités sur ces questions. Une seule exception toutefois : la droite parisienne s’est fendue, sur sa lettre électronique, d’une série d’injures m’accusant de faire « du clientélisme et du communautarisme gay », alors même que je défends l’universalité du combat pour l’égalité des droits !


Marie-Paule Lolo : En effet, il est des tentatives pernicieuses qui tentent de faire passer ma candidature pour une démarche communautariste. Pas plus tard qu’il y a deux jours, lors d’un débat, des représentants des candidats UMP et PS m’ont dit que ce n’était pas la lesbienne que l’on avait invitée mais la candidate. J’ai dû leur répondre que s’ils n’invitaient pas la lesbienne, la candidate ne pourrait pas continuer à débattre parce que la candidate était lesbienne ! J’ai toujours su en me présentant aux législatives que mon orientation sexuelle serait mise sur la place publique. En effet, nous n’allons pas dire à une mère de famille » Madame, faites sortir la mère, nous désirons parler à la candidate », mais nous le dirons à la femme lesbienne. Enfin et surtout, lorsque je présente les idées des Verts et que je souligne les incohérences voire le mépris d’autres partis lors de cette campagne, on dit que je suis passionnée car certainement trop impliquée. Alors, je passe et je continue comme je l’ai toujours fait sur le plan des idées. J’ai appris à ne pas me laisser déstabiliser par ces tentatives qui ne servent pas l’honneur de ceux et celles qui les pratiquent. Lorsque le seul argument politique devient l’attaque personnelle, nous remarquons que les idées ont capitulé.

Martine Billard est dans une situation délicate, son élection en 2002 avait été serrée et elle souffre localement de la communication brouillée de la maire du 4ème arrondissement, Dominique Bertinotti, proche de Ségolène Royal, qui avait fait planer durant quelques jours le doute sur sa possible candidature. Elle sera opposée à 11 candidats dont le principal challenger, Jean-François Legaret (UMP) et le trouble fait du Modem de François Bayrou, Mario Stasi.

Marie-Paule Lolo, quant à elle, subit les candidatures d’autres écologistes dans sa circonscription dominée par la Maire d’Avignon, Marie-Josée Roig (UMP), qui aura pour principal concurrent la socialiste Michèle Fournier-Armand.

EN SAVOIR PLUS

Le blog de campagne de Martine Billard : www.martinebillard2007.org

Le blog de campagne de Marie-Paule Lolo : http://marie-paule-lolo.org

Appel de l’Inter-LGBT à faire battre les candidats vivement hostiles aux personnes LGBT





Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

L’Inter-LGBT appelle faire battre les candidats vivement hostiles aux personnes LGBT

Italie : La Toscane vient une fois de plus en aide aux personnes transsexuelles