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Y a t’il des dance floor au paradis ?






source : theWARNING


http://www.thewarning.info/article.php3?id_article=0185


 


 


Y a t’il des dance floor au
paradis ?


Eric Rofes s’en est
all


 


 Son leadership a normment contribu
nous aider comprendre le besoin d’une discussion honnte sur les communaut
gays, lesbiennes et transgenres et les questions qui les concernent  a
dclar Loren Ostrow du Los Angeles Gay and Lesbian Center, et  son dcs
est une perte pour nous tous, une rare voix de
vrit .


 


Eric, Rofes, le leader du mouvement
amricain de sant gaie s’est teint s’est teint le 26 juin dernier d’une crise
cardiaque l’ge de 51 ans. C’tait un ami de Warning et ce fut un privilge de
le connatre. Nous l’avions rencontr plusieurs fois, en France et aux
Etats-Unis. Volontairement, Eric a pris plaisir collaborer et nous encourager
faire voluer la manire avec laquelle on fait la prvention VIH en France.
Dans les dbuts de Warning, certains s’taient tonns des ruptures que nous
avions introduites dans nos textes. C’est grce Eric que nous avons alors
commenc ce travail de remise en question des normes et ides reues et pouvoir
ainsi nous lever au dessus du dbat franais cadenass autour du sujet du
bareback.


 


Quand certains crient l’irresponsabilit ou
voient les homosexuels tel un peuple damn vou sa propre autodestruction par
le sida (Larry Kramer et consorts), ce militant des droits civiques et sexuels
rpliquait par une vision nettement plus gnreuse o plaisir, sexe et avenir
avaient une place importante. Nous avions fait en 2004 une longue interview
d’Eric  (
http://www.thewarning.info/article.php3?id_article=0069) o il exposait ses ides, notamment la
question de post-crise, ou encore l’impact du sida sur les personnes restes
srongatives. Nous publierons prochainement son intervention la runion que
nous avions organise la mme anne aux Mots la bouche.


 


Fondateur parfois directeur de plusieurs
organisations gays et de lutte contre le sida Boston, Los Angeles et San
Francisco, Rofes vient du mouvement de libration sexuelle des annes 70.
 Ceux d’entre nous qui se lvent pour la libert sexuelle ne sont pas
perdu dans une version romantique de l’ge d’or des annes 70, ce ne sont pas
non plus des hommes avides de bites qui cherchent gostement plus de pouvoir et
plus de privilges. Nous avons t dcrits de manire spcifique comme des
enfants immatures n’ayant pas grandi, on nous a dit que nous devions nous
remettre en phase avec le temps prsent, rentrer notre fiert dans le pantalon
et appliquer nos nergies aux vrais dfis auxquels font face nos communauts,
ainsi la question des gays dans l’arme ou le mariage. Mais nous pensons qu’un
examen rapide de l’histoire du mouvement homo montrera que la libration
sexuelle est inextricablement lie avec la libration gay, le mouvement
fministe et l’mancipation de la
jeunesse. 


 


Aids inc. en
crise


 


A partir du milieu des annes
90, nous avions pass selon lui la phase d’urgence du sida et les gays ne
devaient plus tre soumis de manire infantile un discours de crise datant des
annes 80. Il fallait reconceptualiser le sida, ce qu’il a fait au travers de
deux livres l’impact important, publis au milieu des annes 90 :
Reviving the Tribe :
Regenerating Gay Men’s Sexuality and Culture in the Ongoing
Epidemic

(Haworth, 1996), puis Dry Bones
Breathe : Gay Men Creating Post-AIDS Identities and Cultures
(Haworth,
1998). C’est alors l’occasion d’ouvrir de faon honnte le dbat sur l’volution
de la sexualit des gays et notamment celle des sropos.


 


C’est ainsi qu’il s’inquite
de la pathologisation rampante de l’homosexualit du fait de l’pidmie
persistante de sida.
 Cette identit
pathologique et victimaire, mauvaise conseillre contraint la sexualit des
gays  disait-il en ajoutant qu’  une des manires les plus efficace
d’opprimer des gens, c’tait via la colonisation de leurs corps, la
stigmatisation de leurs dsirs et la rpression de leurs nergies
rotiques. 
Rappelons que nous sommes
aux USA o les attaques contre les gays, politiques ou physiques sont lgions.
Mais en France, la question qu’il soulve se pose aussi. En tant que leader dans
la lute contre le sida – Rofes n’tait pas un novice –  il dclare au Village Voice, en 97 :
 q
uand dans
les annes 80, nous dcrivions le SIDA comme une crise, c’tait la simple
ralit. Ce n’tait pas du pipeau ou un truc publicitaire. N
ous avons eu une rponse psychologique et culturelle propre
alors que circulaient les rumeurs de dcs, l’apparition des lsions sur les
corps, l’empilement des cadavres et la fermeture des sex clubs . Mais pour
Rofes, avec l’arrive des traitements aidant les gens survivre cette
maladie, la communaut est sortie de ce mode de crise et la prvention doit
alors faire de mme. Car  si vous duquez une population de jeunes gays
avec l’ide rpte que le sida est la fin du monde et qu’il va vous attraper,
comment ces jeunes vont considrer d’autres questions telles que la syphilis,
l’abus de substance ou la violence  ? En 99, dans un dito publi
dans Bay Windows sous le titre  les gays ne sont pas stupides ou
auto-destructeurs , il tonne 
nouveau contre les messages de prvention, se rptant l’identique
depuis les annes 80. En cela, il est en phase avec les critiques dj mises
par Walt Odets ds 1994.
Rofes ajoute :
 En reprsentant volontairement de manire travestie les gays qui
organisent leur sexualit et leurs relations en dehors des dictats de prvention
bass sur l’approche de crise des annes 80, les leaders de la lutte contre le
sida ont travers la ligne… Ils trouvent commode d’utiliser les mdias
grand public bienveillants, un moment o le climat public est homophobe et
sexophobe, pour diviser les gay entre bons et mauvais . Ca vous rappelle
quelque chose ? Quand en 97, Tony Valenzuela , acteur porno mais aussi
jeune militant sropositif aborde la question de la sexualit sans prservatif
entre sropos, Eric sera l’un des rares le soutenir face l’hypocrisie du
monde sida, faussement offusqu devant ce fait. La prvention resta sourde
cette ralit et  pour beaucoup, l’interdit devient dsirable, le tabou
produit du dsir, le retour de l’interdit prend corps et est expriment comme
une norme soif . Pour Rofes, il s’agt d’un vaste mouvement d’amnsie
l’oeuvre quand les leons de la libration homo se sont perdus dans la panique
devant les contaminations rptes. Par consquent la prvention VIH devait
alors tre reconsidre dans une approche plus globale, holistique, valorisant
la rduction des risques.


 


Rofes organisa alors le Sex
Pannic Summit en 97 San Diego en raction au mouvement homophobe l’oeuvre
aux USA. Il met ensuite en place les premiers sommets amricains de sant gaie.
Ce qu’il dnomme Aids Inc, qu’on pourrait traduire par Sidacratie, devant alors
tre rform ou s’ouvrir, sinon disparatre. Sur ce point, 10 ans aprs ces
propos, il est en passe d’avoir gagn. Du Canada, des Etats-Unis, d’Angleterre
ou de Suisse, la sant gaie se dveloppe, prenant le pas sur les approches de
prvention sida traditionnelles et mcanistes, et mme en France. 
Au coeur de son travail tait
donc inscrit le dsir de librer la sexualit des gays d’une identit  faonne par la crise du
sida.


 


A Benjamin Shepard, il crivit un jour qu’il
se sentait comme une sorte d’trange survivant d’une tempte, qui revenait d’une
poque diffrente. Beaucoup de ses amis taient dcds. Et en 2005 il lui
dcrit une exprience :  J’tais rcemment une soire, comme il y
en a o l’on danse beaucoup et o des milliers d’hommes gays de ma ville vont
 cabrioler  chaque week-end. J’ai observ au del de la masse de
jeunes dans la vingtaine ou la trentaine, torse nu, levant les bras au ciel.
Immdiatement j’ai pens aux oiseaux de mauvaise augure qui critiquent cette
population de jeunes gays en tenant le propos suivant :  Je ne me
suis pas cass pas le cul pendant 30 ans pour crer une culture de la prise de
drogue, du sexe sans capote et gocentrique . Alors je me suis rendu
compte de quelque chose, quelque chose de trs simple. Comme quelqu’un qui a
pass 30 ans travailler pour la libration homo, la lutte contre le sida et la
libration sexuelle, ce que j’ai vu autour de moi tait prcisment le monde que
j’essayais de crer. Quand nous nous sommes battus dans les annes 80 et 90 pour
protger les cultures sexuelles gays de la destruction, quand nous avons
travaill prserver certaines valeurs, telles que l’amiti ou le dsir
rotique, quand nous travaillions discrtement, derrire la scne, pour
s’assurer que certains espaces puissent survivre la gentrification, aux
mesures de restrictions des services publics de sant, nous nous battions pour
prserver la capacit des nouvelles gnrations d’hommes gays crer des mondes
de plaisir et de dsir. En regardant autour de moi, cette mare d’hommes qui
dansent, j’ai ralis, malgr toutes ces batailles que nous avions perdues
au niveau politique, dans ce qui est dit et dans les mdias, que les gays et
leurs cultures sexuelles s’taient adapts pour survivre, voire
prosprer.  Pour Benjamin, le sida inquitait toujours Rofes, et aucun de
nous ne sait comment on va pouvoir en sortir. 


 


Ce soir, j’irai danser.


 


 


Vous pouvez retrouver Eric Rofes dans la
vido de son intervention la confrence VIH et sant gaie de novembre dernier.
(http://sante-gaie2005.thewarning.info/video.html)


 


Cet hommage a t rdig avec l’aide de ceux
multiples parus dans la presse anglophone et notamment Tobe, New-York Times, Los
Angeles Time, Bay Area Reporter…


 


 


 


encart :


Eric Rofes tait professeur l’universit d’tat
californienne Humboldt. Il y enseignait l’organisation communautaire et les
techniques de leadership. Rofes s’tait impliqu aux tous premiers temps de
l’pidmie de sida. Alors jeune militant vivant Boston, il prit la tte de la
Boston Lesbian and Gay Political
Alliance
(1982/84). Il organisa la premire marche et mobilisation massives
pour obtenir une rponse gouvernementale l’pidmie. Il prpara aussi la
premire brochure de prvention sida pour la ville de Provincetown, une station
estivale proche de Boston et branche gay.


 


En 1985, Eric Rofes dmnagea en Californie et devint
directeur excutif du Los Angeles Gay and
Lesbian Community Services Center
, jusqu’en 88. Dans cette grande agence de
service pour lesbiennes, gais, sropositifs et malades du sida, Rofes supervisa
le travail de prvention VIH vers les gays et bisexuels mais aussi les services
mdicaux, les tests, l’assistance juridique et les conseils aux sropositifs. Il
tait en mme temps l’un des leaders dans la lutte couronne de succs contre
l’initiative visant mettre en quarantaine les malades du sida (AIDS Quarantine Initiative, 1987). Il
s’agissait d’un texte soumis referendum en Californie, et propos par Lyndon
Larouche. Ce fut aussi pendant cette priode que Rofes devint l’un des membres
fondateurs de la Los Angeles AIDS
Commission
ainsi que directeur du 1987 National Lesbian and Gay Health
Conference and National AIDS Forum
Los
Angeles.


Il fut ensuite partie prenante dans la manifestation
historique du 1er juin 1987 devant la Maison Blanche, qui est la premire sortie
nationale d’ACT UP. Il prsida la WAR
Conference
, une runion nationale d’urgence des leaders gay et lesbiens pour
l’laboration d’une stratgie politique au moment o il faut se confronter au
ddain de l’administration Reagan. En 1989, Rofes quitta Los Angeles pour
diriger San Francisco le Shanti
Project
, jusqu’en 1993. Cette agence tait pionnire. Elle fournit alors une
aide amicale, le transport, des logements pour les malades du sida.


Paralllement, Rofes exera une activit journalistique, crivant dans la
presse gay des articles consacrs au VIH /sida. C’est notamment dans OUT/LOOK,
un magazine, qu’il publia en 1990 un article critique sur la
ds-homosexualisation du sida. Eric Rofes a publi plus d’une dizaine de livres
dont deux centrs sur le sida o il tudia les effets du VIH/sida sur les
communauts homosexuelles aux Etats-Unis. C’est tout d’abord au travers d’crits
passionnants dont Reviving the
Tribe : Regenerating Gay Men’s Sexuality and Culture in the Ongoing
Epidemic
(Haworth, 1996), puis Dry
Bones Breathe : Gay Men Creating Post-AIDS Identities and Cultures

(Haworth, 1998) qu’il voqua les ides fortes sur lesquelles nous sommes revenus
dans l’interview qu’il a bien voulu nous donner en 2004. Reviving The Tribe est ax sur
l’exprience post-traumatique d’une gnration qui a souffert des pertes
catastrophiques dues au sida tandis que Dry Bone Breathe, plus polmique,
insiste sur le fait qu’on ne peut plus grer la lutte contre le sida partir du
milieu des annes 90 comme on l’a fait dans les annes 80, c’est–dire comme
une crise et que le systme Aids Inc. doit se rformer.

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