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Alison Arngrim alias Nellie Oleson : Oui oui je suis une icône gay !

Ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de rencontrer un des personnages de la série qui a bercé son enfance. Et si un jour on m’avait dit qu’un jour j’aurai Nellie Oleson, championne internationale des garces dans la catégorie « série télé », je ne l’aurait sans doute pas cru. Pourtant le rendez-vous a bien été pris, et avec cette rencontre, c’est un peu comme si le monde de mon enfance refaisait surface, avec tous les souvenirs et les parfums qui vont avec. La date de l’interview arrivant à grands pas, j’en avais fait la pub sur mon profil facebook, récoltant des commentaires du style « Tire lui les cheveux de ma part, ça sera bien fait pour elle, après toutes les misères qu’elle a faites à la pauvre Laura Ingalls ! » Que Nenni ! Alison Arngrim, la comédienne qui interprétait la petite peste, n’en a gardé aucune méchanceté, bien au contraire. L’actrice partage sa vie entre le théâtre, le cinéma, et surtout un activisme exemplaire en matière de lutte contre le Sida, et aux cotés d’une association qui s’occupe de la protection de l’enfance … Elle est actuellement en France pour présenter son spectacle « Confessions d’une garce de la prairie ». Ce one-woman show emporte un très gros succès, remplissant les salles à rabord, et récolant des critiques dithyrambiques. Alison est venue rendre visite à CitéGAY pour en parler, mais également pour revenir sur son parcours, évoquer ses projets, et parler de ses combats …

Tof : Bonjour Alison, tout d’abord bienvenue en France, et merci d’être là pour répondre à mes questions … Comme l’an dernier tu reviens avec « Confession d’une garce de la prairie » un spectacle basé sur la célèbre série qui t’a fait connaître. Est-ce que c’est vrai que l’idée est née sur une plage de Malibu ?

Alison Arngrim : [Rires] En fait cela fait longtemps que je joue ce spectacle en anglais, notamment à Los Angeles et New-York. Tu sais, je pratique le stand-up comedy depuis l’âge de 15 ans et c’est seulement vers 2002 que mon show est devenu « Confessions d’une garce de la prairie » en anglais. Il se trouve que c’est aussi à cette période que je suis venue à Paris pour la première fois, que j’ai découvert votre pays et que je m’y suis fait beaucoup d’amis, dont Patrick Loubatière (auteur de deux livres d’analyse sur La Petite Maison dans la prairie et intervieweur des acteurs sur les DVD américains de la série; Ndlr). Ca m’a aussi donné l’occasion de découvrir que la « Petite Maison dans la Prairie » avait une popularité incroyable ici en France, alors qu’en Amérique ce n’est pas aussi important. C’est d’autant plus incroyable que cette série est bourrée de symboles typiquement américains ! En France, j’ai été surprise de voir qu’on s’identifiait beaucoup aux personnages. C’est quelque chose que je n’ai pas retrouvé à ce point dans les autres pays. Quelques temps après nous nous sommes revus aux Etats-Unis avec Patrick, et il m’a dit « Tu sais … Nous devrions faire ce spectacle en français ». C’était probablement l’idée la plus folle que j’aie jamais entendue, donc je l’ai fait ! Et, oui ça s’est effectivement passé sur une plage à Malibu ! (le spectacle français est différent à 90% du spectacle américain; Ndlr)

Tof : Faut-il être fan de la série pour venir te voir ?
Alison Arngrim :
C’est un vrai moment de divertissement et vraiment tout le monde vient pour s’amuser. Bien sûr beaucoup de gens sont des grands fans de la série, mais j’ai aussi souvent des personnes qui me disent qu’ils ne l’ont pas spécialement suivie mais qu’ils se sont quand même beaucoup amusés …


Tof : Le public français a la réputation d’être un public très difficile. Ca ne t’a pas inquiété ?

Alison Arngrim : Et bien écoute c’est très bizarre parce qu’effectivement en Amérique on m’avait prévenu en me disant « Tu vas voir, là bas c’est un public très réservé. Il n’y a pas d’applaudissements ou de standing ovation par exemple ». La réalité c’est qu’à chaque fois qu’on a joué le spectacle, la réponse était vraiment incroyable, et on a eu droit à nos standing ovations. C’est déjà inhabituelle d’en avoir dans mon pays, alors en France tu imagines ! Maintenant quand j’ai des réflexions sur le public français « réservé », je réponds « Pas là où je joue ! » [Grand éclat de rire] Peut-être que c’est parce que « La Petite Maison … » est familière aux personnes qui viennent me voir, et du coup ils ne me voient pas comme une étrangère mais presque un membre de leur famille … J’ai tout de même passé de longs moments avec eux dans leur living room ! [Rires]

Tof : Tu as une image un peu décalée non ?

Alison Arngrim : Oui je suis une étrange actrice américaine et beaucoup se sont demandés dans quoi je me lançais lorsqu’ils ont su que je voulais faire un show en français.

Tof : Mais dis-moi vous êtes tout de même deux sur scène … On peut quand même dire que c’est One Woman Show ?

Alison Arngrim : C’est un One Woman Show mais avec un homme en plus ! [Rires] On s’amuse à revoir des extraits vidéos de la série, des extraits de making of, des extraits du DVD, on parle de l’histoire du tournage, et puis il y a aussi tout un passage sur les relations entre français et américains et les différences cuturelles entre les deux pays. Enormément de choses très différentes, plus une bonne part d’improvisation car nous répondons à des questions que le public peut déposer dans une boîte… Du coup tu es sûr que tu ne verras pas deux soirs de suite la même chose !

Tof : En 2007 la pièce avait d’abord été jouée au théâtre Dejazet pour deux soirs avant de tourner dans des petits villages français. Cette fois vous ne faites que les petits villages et pas de théâtre à Paris …

Alison Arngrim : Oui aux Etats-Unis le spectacle fonctionne sur ce principe. Je l’ai joué à New-York et Los Angeles mais aussi dans des plus petits villages ou personne ne va jamais ! [Rires] J’adore ça … J’ai fait ce spectacle pour les gens vrais, et en priorité pour ceux qui ont grandi avec la série. J’aime beaucoup le fait que derrière la phrase « Je vous déteste, vous êtes une garce ! » il y ait tout de suite un regard attendri et un « Ho … Mon enfance ! » Et puis j’aime bien aussi pouvoir dire : « Ca y est maintenant vous pouvez la voir dans vore village. Pour ça vous n’avez pas besoin de prendre le train pour Paris ! » Ca fait un spectacle très spécial et plus intéressant . En plus, pour moi c’est comme un acte de performance … Souvent nous découvrons de très jolis villages, ce qui ne gache rien à l’expérience !

Tof : Dis-moi, certains enfants stars ont traversé de graves crises, avec souvent des problèmes de drogue, après leur période de médiatisation. Comment l’après « Petite Maison dans la prairie » s’est passé pour toi ?
Alison Arngrim : [Rires] Oui d’ailleurs mon ami Paul Petersen, qui jouait le fils de Donna Reed dans « The Donna Reed Show » dans les années 60 (et qui a tourné dans la série « Matt Houston » dans les années 80; Ndlr), a créé l’organisation « A minor Consideration » qui permet de mieux protéger les enfants stars et les travailleurs mineurs ! Pour eux la transition à l’âge adulte est vraiment très difficile et beaucoup perdent le sens des réalités lorsqu’il s’agit de toucher l’argent qu’ils ont gagné. Par contre aucun enfant issu de la « Petite Maison dans la prairie » n’est concerné. En fait nous avions un environnement différent, avec une notion de « travailler dur » beaucoup plus marquée. Nous n’étions pas entourés de choses très glamours par exemple. Et nous êtions vraiment très bien encadrés, je pense que ça a beaucoup joué ! Chez nous tout le monde porte une petite culotte ! [Rires] Notre famille était forcément très importante pour garder les pieds sur terre et puis nous êtions une véritable bande de copains, tous solidaires. Tu sais nous sommes encore amis aujourd’hui et on garde le contact via facebook ou myspace, ce qui semble anormal pour Hollywood où en général lorsqu’ un projet est fini, la plupart des acteurs ne s’adressent plus jamais la parole ! Melissa Gilbert (Laura dans la série; Ndlr) m’a encore envoyé un sms hier pour me dire qu’elle était dans une comédie musicale basée sur le livre qui a inspiré la série de la Petite Maison dans la Prairie. Ce qui est drôle c’est que maintenant elle y joue la mère de la famille Ingalls !


Tof : Le fait après toutes ses années, de toujours te présenter en tant que « Nellie Oleson », la garce de la prairie, est-ce que ce n’est pas une manière de ressasser le passé ? N’es-tu pas un peu prisonnière de ce personnage ?
Alison Arngrim :
[Rires] Mais je suis très fière de ce personnage ! Au lieu de dire continuellement « Non non je ne veux pas parler de Nellie Oleson ou de la Petite Maison » . Qu’est-ce que ça fait si je dis « Allez on y va «  ? [Rire] C’est vrai que cette image était vraiment très lourde à un moment donné, mais finalement j’ai fini par prendre tout ça avec du recul parce que ça reste juste un spectacle, un show ! Ce serait comme renier un rôle qui a fait ce que je suis aujourd’hui … Regarde Larry Hagman, il ne parle pas tout le temps de Dallas ? Non je trouve que c’est une sorte de dette envers mes fans tout simplement ! Je suppose aussi que ce spectacle a une valeur thérapeutique. Il y a des tas de choses bizarres qui arrivent et que je n’aurais jamais cru possibles . Beaucoup de célébrités adorent Nellie et figure-toi qu’il y a même un groupe de rock qui s’appelle Nellie Oleson !


Tof : On va bientôt te retrouver dans « Make the Yuletide Gay » une comédie très gay … Peux-tu m’en dire plus ?

Alison Arngrim : C’est très drôle ! Une comédie romantique de Noël dans laquelle je joue l’ex-girlfriend d’une mère. [Rire] C’est l’histoire d’un jeune homme qui vit ouvertement son homosexualité à la fac, êtant même à la tête d’une association gay, mais qui n’a toujours pas fait son coming-out auprès de ses parents. Ceux-ci profitent des fêtes de Noël pour essayer de le caser avec une de ses vieilles copines de Lycée, mais c’est précisément à ce moment que son petit copain débarque pour lui faire une surprise ! Ce n’est pas la première fois que je m’attaquais à l’univers gay car j’avais déjà joué les lesbiennes dans une pièce de théâtre qui s’appelait « Last Summer At Bluefish Cove ». Tu vois que les thèmes gay ne sont pas inhabituels pour moi [Rires] Le film a été extrêmement bien reçu lorsqu’il a été présenté lors de festivals gays aux Etats-Unis et au Canada.

Tof : Les épisodes de « La petite maison dans la Prairie » comportaient régulièrement une sorte de petit cours de morale, avec à chaque fois un message qui prônait la tolérance. Je n’ai pas souvenir que la série ait abordé l’homosexualité. Etait-ce trop tôt ?

Alison Arngrim : Je te rappelle que dans les années 1800, en Amérique, être gay était illégal donc cela aurait été très difficile d’en parler. Mais tu sais Charles Ingalls s’élevait toujours contre les préjudices, quels qu’ils soient, et je pense qu’il ne se serait pas comporté de manière différente, que lorsqu’il prenait la défense des noirs par exemple. Nous avons fait des choses vraiment intéressantes historiquement dans la série, en parlant des problèmes de racisme, d’antisémistisme, d’addiction à la drogue aussi, en parlant d’un homme de retour d’une guerre civile qui devenait addict à la morphine. En même temps je pense que si la série n’avait dû parler que de discrimination et d’inégalité, le format n’aurait pas été aussi divertissant.

Tof : As-tu déjà songé à créer toi-même ta propre série ?

Alison Arngrim : Ho ! Il a été question à un moment de créer un spin-off de la petite maison dans la prairie, qui se serait appelé « Les Oleson », mais ça n’a pas eu de suite. Et une série pour moi maintenant ? Je suis tout à fait partante ! [Rire] Ce serait toujours un peu une garce, ça me colle à la peau ! [Rires]

Tof : Penses-tu que tu es une icône gay ?

Alison Arngrim : Oui complètement ! [Rires] On n’arrête pas de me le dire, par mail ou partout où je vais que ce soit New-York ou Los Angeles ! Je suis une icône gay ! Je suis une icône gay ! D’ailleurs quand Melissa Gilbert me parle elle dit souvent « Hey ! Icône Gay, qu’est-ce que tu es en train de faire ? » C’est compliqué de dire pourquoi exactement … J’ai tout simplement l’impression que beaucoup de gays ont grandi avec la « Petite Maison dans la prairie ». En fait cela concerne toutes les personnes qui se sont senties rejetées par leurs parents … D’une certaine manière la famille Ingalls était un peu une famille de substitution … Et puis on m’a dit que beaucoup d’hommes gay aiment vraiment Nellie Oleson en particulier, à cause de son côté salope, comme Bette Davis ! Nous avions un peu la même coupe de cheveux donc ça doit être un peu lié ! [Rires] Et ensuite, dans les années 80, lorsque Steve Tracy est mort du Sida et que j’ai commencé à m’impliquer dans la lutte contre cette maladie, je pense que de nombreux gay m’ont reconnu et que ça a cimenté une affection qu’ils avaient déjà envers moi. Psychologiquement, il y a sûrement eu des tas de choses, que je ne peux même pas expliquer, qui ont fait que je voulais être une icône gay ! [Rires]

Tof : Peux-tu me parler plus précisément de ta lutte contre le sida ?

Alison Arngrim : Oui elle a commencé à la mort de Steve Tracy, mon mari dans la série. Il est parti en 1985-86, mais son décès a été rendu public en 1986. Il a eu vraiment de la chance d’avoir encore sa mère et sa soeur autour de lui parce que beaucoup de malades n’avaient pas d’argent et étaient rejetés par leur famille et n’avait même pas la présence d’une mère pour être réconfortés. Donc j’ai fait tout ce que j’ai pu pour lui. C’est précisément pour venir en aide à ces personnes que j’ai voulu rejoindre AIDS. Il y a tellement de personnes différentes qui sont touchés par cette maladie. Pauvres, riches, noirs, blancs, elle touche vraiment tout le monde et il y a souvent un véritable travail d’éducation à faire. La même maladie peut avoir les pires effets sur les personnes infectées parce qu’elles n’ont pas le même accès aux ressources qui vont permettre de les soigner. Tout cela me préoccupe et je continue de me battre avec les associations.

Tof : Et que penses-tu du fait que certaines personnes baissent un peu leur vigilance sur le préservatif, avec le phénomène du relapse notamment ?

Alison Arngrim : Oui je comprends, mais c’est terrible ! Terrible ! [Colère] L’autre jour j’ai encore appris qu’il y avait des milliers et des milliers de nouvelles infections à Los Angeles. La réalité c’est que si aujourd’hui tout le monde dit : « Ok, je vais faire ce qu’il faut, on peut stopper le Vih », personne ne commence vraiment à faire ce qu’il faut. Aujourd’hui la transmission se fait seulement par le sexe et la drogue. Il suffit de mettre un préservatif, de nettiyer les seringues, et puis c’est tout ! Malgré tout il y a encore des gens qui ne font pas cela. Si tout le monde prenait les précautions basiques cela serait un vrai progrès, mais il y a quelque chose dans la nature humaine, qui fait qu’on ne veut pas croire au pire. Bien entendu il y a des nouveaux médicaments mais les effets secondaires sont parfois tellement lourds à supporter ! C’est trop cher, ce n’est pas agréable. Alors oui on est toujours vivant ! Mais aussi tout le temps malade! Il faut passer son temps chez le docteur. Ca ne concerne bien entendu pas que les gays mais aussi les hétérosexuels. J’ai parlé récemment à des personnes qui ont été infectées durant les deux dernières années et je me suis dit: « Mais comment est-ce que c’est encore possible ? » malgré tout ce que l’on sait aujourd’hui sur les modes de transmission de la maladie, il y a encore des infections, c’est terrible !


Tof : Tu as un autre combat, pour la protection de l’enfance cette fois … Peux-tu m’en dire plus ?

Alison Arngrim : Oui, en 2004, un ami m’a parlé de l’association Protect, qui fait des actions politiques spécifiques pour les enfants. Il y a un problème qui me préoccupe vraiment, c’est le fait que les maltraitances envers les enfants soient punies par la prison, excepté dans le cas de l’inceste. Nous avons réussi à changer les lois dans 7 états, et d’un point de vue fédéral nous avons pu réunir des fonds pour la Police et le FBI.

Tof : En fait les activités au sein d’organisations représentent 80% de ton temps …

Alison Arngrim : [Oui] Je suis constamment en train de chercher un nouveau combat [Rires] c’est la Nellie Oleson en moi [Rires] C’est vrai que je fais beaucoup de choses, des films, du théâtre, du stand-up, des one woman show en anglais, des one-woman show en français, j’écris un livre, je travaille avec Protect, les associations contre le Sida, donc oui c’est vrai je suis complètement débordée ! [Rires]

Tof : Puisque tu es sensible à la cause des enfants, je suis un peu obligé de te demander ce que tu penses de l’adoption par un couple homosexuel …

Alison Arngrim : Deux homosexuels ou deux lesbiennes peuvent être d’aussi bons parents que des hétérosexuels. Dans certains états en Amérique, ils peuvent adopter. Il y a beaucoup d’enfants qui donneraient cher pour s’enfuir de chez leurs parents hétéro, pour pouvoir aller chez des parents homosexuels ! Je ne pense pas que le fait d’être gay ou hétéro soit un critère important pour les personnes qui veulent adopter. Il faut juste être un bon parent et ne pas leur porter atteinte.

Tof : Quels sont tes projets après ce spectacle ?

Alison Arngrim : Il y a beaucoup de possibilités de projets en Amérique mais je ne connais pas encore ceux qui verront le jour. En attendant j’écris un livre, et lorsque je retourne à Los Angeles en Décembre, c’est pour y continuer le spectacle en américain… [Sourire]

Un grand merci pour cet entretien plein de chaleur, d’humour et de simplicité. Les internautes de CitéGAY ne manqueront pas de venir t’applaudir avec grand plaisir, pour évoquer avec toi les inoubliables de « La Petite Maison dans la prairie », et rire des différences et points communs entre français et américains …

Plus d’infos sur www.alison-arngrim.com/

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