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Pierre Bergé étudierait la vente du magazine TÊTU

Alors que le magazine voulu, conçu et financé, sans préoccupation de rentabilité pouvait-on penser, par l’homme d’affaires est depuis son origine lourdement déficitaire, Pierre Bergé chercherait à se désengager.

«DES PERTES ESTIMEES A 2 MILLIONS D’EUROS EN 2010, POUR 3,5 MILLIONS DE CHIFFRE D’AFFAIRES»

Ce n’est pas la première fois que la rumeur bruisse au sein du landerneau LGBT et médiatique. Certains avec gourmandise, d’autres avec intérêt pour le sort du magazine LGBT de référence français commentent la publication d’une brève de La Lettre de l’Expansion reprise par Ozap.com.

«Le magazine est déficitaire depuis sa création, avec des pertes estimées à 2 millions d’euros en 2010, pour 3,5 millions de chiffre d’affaires» indique ainsi la lettre spécialisée. Avec 15 années d’existence, TÊTU creuse son déficit et voit depuis plusieurs années son chiffre d’affaires s’éroder comme le nombre de ses ventes payées.

Cette insertion de La Lettre de l’Expansion révélerait que les résultats financiers de TÊTU se dégradent plus encore. Son dernier bilan publié, celui de l’exercice 2009, faisait déjà état d’un résultat négatif du même ordre pour un chiffre d’affaires de 4 millions d’euros (ndr : la société éditrice de TÊTU, CPPD, publiait un CA de 5.6 millions en 2006). Un mandat de vente aurait été confié à un spécialiste en fusion-acquisition et «Pierre Bergé consentirait à opérer une recapitalisation du titre avant sa vente afin de donner au repreneur le temps de le faire évoluer vers un modèle rentable» écrit encore La Lettre de l’Expansion.

Ces données sociales reflètent les données de ventes de TÊTU. Selon OJD, le magazine s’est vendu à 40.000 exemplaires par mois en moyenne en 2010, contre près de 54.000 exemplaires en 2005.

TÊTU SOUMIS AUX MÊMES MUTATIONS QUE LA PRESSE GENERALISTE

A sa création, acheter TÊTU pouvait être perçu comme un acte identitaire et communautaire. La multiplication des magazines lifestyle, la multiplication du traitement de l’actualité LGBT, sur le web mais aussi par la presse généraliste, comme l’acception croissante du fait homosexuel au sein de la société, a déconnecté l’acte d’achat de TÊTU de toute forme d’acte militant. Ce constat semble avoir été fait par ailleurs par le magazine lui-même qui a muté depuis deux ans, et sous la responsabilité de Gilles Wulus, vers un magazine plus généraliste, lifestyle et people le mettant alors en concurrence avec d’autres titres sur ce créneau masculin, urbain et consumériste.

Plus que cette concurrence externe, TÊTU a su créer sa propre concurrence avec le développement d’une édition web attractive mais dont la monétisation est balbutiante et limitée à la publicité en ligne. Mais un succès d’audience n’est pas propre en soi à garantir l’équilibre économique d’un éditeur ni propre à garantir la pérennité d’un titre ou site quelque soit son attrait éditorial. Aussi, le succès croissant de l’édition web ne s’est pas traduit par une augmentation des revenus publicitaires liés, crise économique oblige, la publicité en ligne étant par ailleurs moins rémunératrice que celle papier. De plus, le site du magazine, TÊTU.COM, n’a pas muté vers un portail LGBT propre à se constituer un terreau d’abonnés potentiels, encore moins de lecteurs papier, la reprise large et gratuite de l’édition imprimée rendant semble-t-il pour beaucoup de lecteurs peu opportun le besoin d’acheter la version papier du titre. Enfin, les internautes web se comportent davantage sur un site éditorial strict comme des lecteurs de presse gratuite que comme des internautes abonnés souscripteurs de services valorisés.

Aussi, le redressement du titre pourrait se faire dans la douleur, les recettes éprouvées ailleurs étant malheureusement connues et se traduisent généralement par des réductions drastiques des coûts, de la masse salariale, l’étude de synergies d’éditions, la mutualisation de contenus voir l’abandon de la diffusion en kiosque ou de la diffusion papier tout court. Ce dernier schéma semblerait même logique eu égard au déclin de la diffusion papier payante inversement proportionnelle à la croissance du lectorat web.

La monétisation de TÊTU.COM et la sublimation de l’éditeur papier en éditeur web serait alors tout l’enjeu pour garantir la pérennité de la marque TÊTU. S’il souhait se désengager de TÊTU, Pierre Bergé semblerait alors vouloir davantage trouver un repreneur propre à assurer cette mutation que de vouloir signer son acte de divorce avec un titre qu’il a créé et porté moralement et financièrement. Son engagement dans le quotidien Le Monde avec Xavier Niel et Matthieu Pigasse n’explique pas ce souhait de se désengager de TÊTU s’il venait à se confirmer. Agé de 80 ans, Pierre Bergé peut également légitimement souhaiter que le titre succède à sa propre personne.




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