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Jasmin, victime de l’homophobie à l’école pendant 5 ans, raconte son calvaire

C’était il y a 33 ans. Mais le harcèlement homophobe qu’a subi Jasmin Roy à l’école, lui a laissé des cicatrices indélébiles. Dans Sale pédé*, qui parait ce jeudi en librairie, le comédien et animateur québécois, décrit les humiliations quotidiennes qu’il a vécues dans l’enseignement secondaire. Un récit rare sur l’homophobie scolaire, qui demeure encore un sujet tabou, malgré les différentes initiatives conjointes de l’Education nationale et d’associations, pour lever le voile sur ce fléau.

L’histoire qu’a vécue Jasmin Roy s’est passée dans la campagne québécoise, mais aurait pu se dérouler dans l’Hexagone, le harcèlement scolaire touchant un élève français sur cinq. C’est parce qu’il est efféminé, que l’adolescent devient la tête de Turc de ses camarades masculins, pendant les récréations et dans le bus scolaire. Des agressions commises en groupe et qui démarrent part des insultes homophobes : Jasmin est tantôt appelé « tapette », « tantouze » et « sale pédé ». Aux injures viennent s’ajouter les coups de poing, gifles et crachats. « Je sombrais graduellement dans un profond désespoir, emprisonné par mes bourreaux qui réussissaient à intensifier et à raffiner de jour en jour leur haine facile et gratuite », décrit-il. Certains jours, Jasmin s’empêche d’aller aux toilettes puisque c’est le lieu où les sévices qui lui sont infligés sont les plus violents. Et les cours de sport, deviennent de véritables séances de torture pour l’adolescent.

Il s’enferme dans le mutisme

Les effets de ces humiliations sur son équilibre psychologique et sa santé se font vite sentir. Jasmin souffre de terreurs nocturnes, de vomissements causés par l’angoisse. « J’ai perdu ce que j’avais de plus précieux à cette époque : mon sourire », résume-t-il. Et même si ses parents se plaignent auprès des chefs d’établissements, les violences qu’il subit sont banalisées.

Rares sont les enseignants qui interviennent en sa faveur et lorsqu’ils le font, ses agresseurs, furieux d’être punis, redoublent de violence envers lui. Ce qui le pousse, de guerre lasse, à encaisser les affronts sans broncher : « La solitude, l’abandon, l’humiliation m’ont fait sombrer dans un silence farouche », confie-t-il. Et il est à chaque fois obligé de courber davantage l’échine : « Combien de fois ai-je dû m’excuser auprès de mes détracteurs d’être simplement celui que j’étais : un sale PD qui ne savait même pas encore qu’il deviendrait homosexuel un jour », témoigne-t-il.

Ce n’est finalement que cinq ans plus tard, lorsque ses bourreaux sont orientés dans la filière professionnelle que Jasmin obtient un peu de répit. Et grâce au théâtre, il trouve une forme de résilience. « On découvrait pour la première fois mon charisme enfoui », raconte Jasmin, qui finit par susciter l’admiration de ses camarades.

« Aujourd’hui, je n’ai plus peur des hommes hétéros »

Maisles traumatismes ont la vie dure. « Les souffrances passées sont inscrites dans la tanière de l’inconscient et attendent le moment opportun pour revenir nous hanter », écrit joliment Jasmin. « Au début de l’âge adulte, l’anxiété me paralysait et étouffait chacune de mes paroles lorsque j’étais en présence d’hommes uniquement », raconte-t-il. Jasmin, devenu jeune homme, souffre aussi toujours d’un énorme déficit de confiance en lui : « je traînais en moi une crainte démesurée d’être rejeté par mes pairs », poursuit-il.

Et alors que Jasmin est devenu comédien et qu’il a trouvé l’amour, il est foudroyé par ses troubles de l’anxiété. Un mal soigné à coup d’antidépresseurs et de psychanalyse. Jasmin finit aussi par exprimer sa colère et par comprendre pourquoi les adultes ne l’ont pas secouru lorsqu’il était agressé à l’école : « avec le recul, j’ai réalisé que les surveillants et les enseignants ne veulent pas s’investir dans une démarche antihomophobe par peur d’être étiquetés comme des alliés des homosexuels », écrit-il. « Aujourd’hui, je n’ai plus peur des hommes hétéros », se félicite celui qui a créé une fondation luttant contre le harcèlement scolaire.

Au-delà du récit de son histoire, Jasmin Roy délivre aussi des messages à l’intention des ministres de l’Education de tous pays. Pour lui, il est urgent de poursuivre la sensibilisation à dans les établissements aux discriminations homophobes, de former les enseignants et les surveillants à s’interposer dans les manifestations de violence homophobe. Un discours qui portera sûrement lors de la journée nationale « non au harcèlement », le 3 novembre prochain.

« Sale pédé », Jasmin Roy, Les éditions de l’homme, 13 euros.

Source : 20mn




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