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Sida : le traitement, vers un moyen de prévention complémentaire au préservatif mais limité et complexe

Le Conseil National du Sida n’a pas totalement franchi le Rubicon mais en tout cas prépare les pouvoirs publics, professionnels de santé, associations et premiers concernés, séropositifs et séronégatifs sexuellement actifs, à le faire.

Dans un long avis, le CNS a pris soin de reprendre l’intégralité des enjeux, des données scientifiques, les bénéfices éventuels sans occulter les limites et difficultés d’une complémentarité des moyens de prévention en faisant du traitement antirétroviral une donnée préventive collective possible et non plus uniquement un élément médical individuel.

Cet avis français intervient après un long débat, initié suite à un avis suisse de janvier 2008 qui faisait état de la non transmibilité du Vih au sein de couples sérodifférents : «Il stipulait ainsi qu’une personne infectée par le VIH traitée par multithérapie antirétrovirale hautement active, strictement observante, ayant une charge virale indécelable depuis plus de six mois, et exempte de toute autre infection sexuellement transmissible, n’était pas susceptible de transmettre le VIH au cours d’un rapport hétérosexuel».

Pas de changement de paradigme pour le CNS, une nouvelle donnée à prendre en compte, «une perspective nouvelle pour le contrôle de l’épidémie», le préservatif étant à juste titre mentionné comme mode à efficacité préventive maximum. Toutefois, le CNS accueille le fait que « la mise sous traitement des personnes infectées réduit fortement le risque que ces personnes transmettent le virus par voie sexuelle», les données scientifiques «ouvrent une perspective nouvelle pour le contrôle de l’épidémie. Outre le bénéfice thérapeutique individuel qui justifiait et guidait sa prescription jusqu’ici, le traitement pourrait être utilisé également pour son impact sur le niveau des transmissions et devenir ainsi un outil capable, à un niveau collectif, d’enrayer la dynamique de l’épidémie».

Le constat du CNS : l’épidémie est freinée mais pas contenue, y compris dans des pays à hauts niveau de santé, comme la France, où le nombre de personnes vivant avec le VIH augmente quantitativement. L’idée d’utiliser le traitement également pour sa capacité à réduire le risque de transmission sexuelle du virus vient à la fois pour le CNS de la «forte corrélation entre le niveau de charge virale dans le sang et le risque de transmission lors de relations sexuelles, et d’autre part sur des usages déjà validés du traitement pour prévenir la transmission dans certaines circonstances» à savoir les traitements prophylactiques pour les femmes enceintes séropositives et les Traitements Post Exposition donnés à des personnes séronégatives exposées au Vih.

Toutefois les limites sont nombreuses. La première, c’est que le traitement, outil préventif, implique un haut niveau de dépistage et de mise sous traitement pour qu’il y ait un bénéfice collectif avéré alors qu’un tiers des personnes séropositives, pour le seul exemple français, ignore leur statut sérologique. Au-delà, pour les populations fragilisées ou particulièrement exposées, l’incidence d’autres IST sur la transmission, les modes de contaminations et pratiques sexuelles comme une augmentation éventuelle de la fréquence des pratiques à risques peuvent «venir contrebalancer l’impact positif des traitements». Principalement, «dépister mieux et plus tôt», et dépister fréquemment, est un impératif absolu, la question d’une mise sous traitement plus précoce des personnes dépistées se posant de surcroit, outre les débats actuels qui montreraient un effet médical positifs sur la morbidité, et pas seulement préventif, d’une telle précocité. Le dernier obstacle est la parfaite observance et réponse individuelle aux traitements. Enfin, l’information doit être parfaite, complète et précise, «l’existence d’un risque faible mais non nul» étant souligné.

Le CNS souhaite ainsi «refonder le pacte préventif» : «Ne pas opposer traitement et usage du préservatif et penser leur complémentarité consiste à affirmer que l’usage de l’un n’exclut pas l’autre et que la combinaison des deux apparaît garante d’une sécurité maximisée. Mais c’est également affirmer qu’à défaut, l’usage d’un seul de ces moyens apparaît toujours préférable à une absence totale de protection. Le traitement peut constituer un instrument précieux pour éviter de nombreuses contaminations chez des personnes qui, de fait, pour de multiples raisons, n’utilisent pas, ou pas toujours, ou pas de façon adéquate le préservatif».

Si une avancée au niveau médical peut se comprendre sur le papier, au niveau social, les traitements comme outils préventifs pourraient avoir des incidences non négligeables. Coté négatif, le CNS l’a souligné avec des risques d’augmentation de la fréquence des prises de risques, qu’il contrebalance en cas de dépistages accrus. Coté positif, la modification de la perception qu’ont d’eux mêmes les personnes séropositives en actant le fait que le traitement réduit très fortement le risque de transmission. Une telle logique est également un élément favorisant la bonne observance des traitements comme propre à modifier les perceptions sociales de la maladie, le CNS estime que «la diffusion dans la population générale de l’information sur la réduction du risque de transmission chez les personnes traitées peut contribuer à banaliser l’idée que les personnes infectées ne représentent pas un danger quand elles assument leur statut et suivent un traitement», favorisant de surcroit la discibilité du statut sérologique.

En conclusion le CNS assume «un discours de prévention plus complexe» et effectue une série de recommandations aux pouvoir publics, personnels de santé et associations pour prendre en compte cette dimension nouvelle.

EN SAVOIR PLUS

L’avis complet du CNS (Format PDF) : www.cns.sante.fr

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