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Le sérotriage promu en Californie dans la prévention sida, mais à quel prix ?

Par définition, une révolution au sens large sert à désigner tout changement qui bouleverse l’ordre établi dans un domaine quelconque.

Si elle peut être dans les faits constatée, voire issue même d’autorités publiques ou reconnues, il n’est pas évident sur le sujet qui nous intéresse aujourd’hui que l’on puisse s’en réjouir quand bien même des données statistiques sembleraient accréditer son bien fondé, d’autre données, tues celles-ci, vont à l’encontre de sa promotion.

En l’espèce, l’association WARNING rapporte une «Révolution en Californie dans la prévention sida», le Département de santé de la ville de San Francisco venant de lancer une campagne sur le serosorting qui constitue «un tournant historique dans la politique de prévention sida». San Francisco a été la ville américaine la plus touchée par l’épidémie de sida et près de 25% des homosexuels y sont actuellement séropositifs. Le phénomène de relapse au sein de la communauté gay a été constaté localement comme partout ailleurs pourtant le nombre de contaminations à San Francisco est stabilisé depuis 1999 et même en baisse depuis peu.

«Pour comprendre cette contradiction, il a été montré que si les relations non protégées étaient en augmentation, celles avec un partenaire de statut différent ou inconnu, qui représentent le risque réel de transmission du VIH, étaient elles en diminution. Cette situation s’explique par la mise en place depuis plusieurs années d’une nouvelle stratégie de prévention par les gays eux-mêmes. Cette stratégie se dénomme serosorting ou status sorting. Elle consiste à choisir son partenaire et ses pratiques sexuelles en fonction du statut sérologique du partenaire» explique WARNING. Elle implique que chacun communique à son partenaire son statut sérologique.

Le Département de santé local vient d’entériner cette situation en ouvrant un site Internet de conseil pour favoriser la communication du statut sérologique entre partenaires sexuels (www.disclosehiv.org). «En se mettant en phase avec la variété des pratiques de prévention des homosexuels, le Département de santé prend une décision révolutionnaire qui réinstaure le dialogue et donne un nouveau souffle à la prévention» déclare Olivier Jablonski de l’association WARNING.

Si la promotion du dialogue entre partenaires sexuels, occasionnels ou non, sur le statut sérologique est parfaitement louable tout comme des approches innovantes en matière de prévention comme la fin de tout tabou dans les débats liés aux sujets de santé publique doivent être encouragé, doit-on se féliciter de l’initiative californienne promouvant de prime abord le sérotriage ?

Oui, si l’on fait du seul constat d’un diminution ou d’une stabilisation des séroconversions au VIH la réussite de pratiques préventives mais ce prisme du résultat positif est à la fois trompeur, partiel et partial. Sur les tous les autres sujets la réponse ne peut être que fortement négative.

Tout d’abord, et alors même que l’on doit promouvoir au-delà du seul enjeu lié au Sida la notion émergeante de santé gay, la prévention ne se limite pas uniquement à empêcher les séroconversions au VIH mais également à lutter contre les infections et co-infections aux autres IST et MST.

Egalement, le bénéfice objectif pour les personnes séropositives à demeurer safe lors de leurs rapports sexuels est totalement balayé. Sur le sujet, la dernière campagne du SNEG avec l’accroche «PERCUTE, baiser sans capote = risque pour le séropo comme le séroneg»est en total contradiction avec celle américaine. Outre les effets potentiellement désastreux de la sur-contamination par une autre souche VIH, de la co-infection par une IST ou encore de la co-infection par l’hépatite C, première cause de mortalité parmi les séropositifs, la campagne du SNEG met en avant les bénéfices individuels très directs que les hommes séropositifs tireront de l’utilisation systématique du préservatif avec leurs partenaires séronégatifs ou séropositifs : «Se protéger systématiquement lorsqu’on est séropositif, c’est mettre toutes les chances de son côté : lutter contre la détérioration de son système immunitaire, favoriser l’efficacité de son traitement afin de préserver son capital santé» rappelait l’association française dans un communiqué.

Finalement, et alors même que la prévention a oublié de donner aux gays séropositifs les véritables arguments qui justifient à eux seuls un changement radical d’attitudes et de comportements ayant pour incidences qu’ils adoptent des stratégies (trompeuses) de prévention via la pratique de sérotriage, la campagne californienne conduit à une banalisation des prises de risques avec des conséquences négatives tant pour la population gay séropositives que pour celle séronégative à qui l’on avancerait le serosorting comme mode bénéfique de protection.

Admettons qu’une adaptation des politiques de prévention aux pratiques réelles puisse être encouragée, au moins en débattre, pour autant on ne peut faire l’économie en parallèle de dénoncer les effets pervers de ces nouvelles politiques tout comme les éventuels effets négatifs en terme de santé gay.

EN SAVOIR PLUS

Le communiqué complet de WARNING : Ici.

Nouvelle campagne du SNEG intégrant la perspective des personnes séropositives

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