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Les Vedettes : On ne nous fera pas dire n’importe quoi, on est des filles libres !

Pas la peine de me perdre dans le métro pour me rendre à ma nouvelle interview cette fois, car il suffit de traverser la route pour rejoindre deux demoiselles plutôt très sympathiques, qui vont me parler de leur groupe, de leur album et de leurs concerts. Je te dispense de la petite entrée en matière habituelle du style « le soleil commençait à poindre, et j’apercevais au loin l’entrée de l’hôtel ou mon entretien devait avoir lieu. Comme d’habitude je sentais mon coeur battre distinctement … » Comment ça tu es soulagé ? Bon, passons ! Je me présente donc à la porte du Café de la Musique, et suis accueilli très chaleureusement … En prenant place, j’entends « Hola, vous faites des castings chez les journalistes ou quoi ? Pas mal ! » Oui je sais en lisant ça tu vas te dire, quel prétentieux encore celui-là… Ben c’est comme ça épicétout ! Na ! Me voila face à deux jeunes femmes charmantes, issus de la formation belge et déjantée Les Vedettes, prêtes à répondre à mes questions avec humour, sourires et décontraction … Un moment que je te propose de découvrir sans plus attendre !

Tof : Salut les filles, prêtes pour une interview déjantée ? Pouvez-vous tout d’abord revenir sur les débuts des Vedettes, et surtout m’expliquer comment ça se fait que vous n’êtes plus que 8 alors qu’à la base vous étiez 15 ?

Les Vedettes : Hé, Hé ! Ben on a jeté des billes parterre et on n’a gardé que celles qui avaient réussi à tenir debout. On voulait aussi garder les moins moches à vrai dire ! [Rires] Non plus sérieusement à la base deux amies, Agathe et Jill avaient envie de faire une espèce de performance en rapport avec les majorettes, en réunissant des artistes bruxelloises, plasticiennes, comédiennes, journalistes qu’elles connaissait ou avec qui elle avait envie de travailler. Tout le monde a dit oui, probablement parce que ça relevait de quelque chose de l’enfance. On a commencé par un spectacle de 10 minutes, et puis les gens nous ont dit que c’était trop drôle et qu’il fallait vraiment en faire un spectacle de rue. On a alors créé des chorégraphies, et on a suivi des stages de twirling bâton, pendant lesquels on jetait le bâton très très loin … [Sourires] En fait tout s’est fait complètement naturellement, en fonction des disponibilités de chacune. Au démarrage, c’est vrai qu’on était une quinzaine. Ensuite dans le spectacle on est descendues à douze, et pour les Vedettes, la maison de disques nous a imposé un chiffre maximum de 8 . Elle nous avait dit : « Financièrement si vous êtes plus, on ne va pas y arriver » .

Tof : A quoi ressemblait ce spectacle ?

Les Vedettes : Et bien ça partait vraiment comme un défilé de majorettes, avec musique, fanfare etc … Tout devait aller bien mais au fur et à mesure, il y avat des accidents entre nous, ou même la musique qui déraillait, jusqu’à ce que ça devienne vraiment du grand n’importe quoi … Là, contrairement aux Vedettes, on avait vraiment des personnages avec chacune des prénoms, et il y avait des interactions entre nous comme entre des personnages de théâtre, avec des amitiés, et des inimitiés etc … Même s’il y avait une trame à suivre, c’était avant tout un spectacle de l’instant, qui n’était jamais le même suivant le lieu où on se trouvait, avec une grande part d’imprévu donc … [Sourires]

Tof : Personne n’a démissioné du projet à cause des paroles écrites par Philippe Katerine ?

Les Vedettes : Ho nooon pas du tout ! Je pense surtout que c’était une question de choix. Le projet a pris de l’ampleur et toutes n’ont pas pu s’y impliquer forcément comme elles le voulaient, à cause notamment de leur « vrai métier » … Ca s’est fait très naturellement car il fallait être disponible à des dates précises et fixes pour les enregistrements. En fait celles qui pouvaient être libres à ces moments là, feraient partie du projet définitif ! [Sourire]

Tof : Dites-moi, y a-t-il une vraie chanteuse parmi vous ?

Les Vedettes : Non personne ! [Rire] Mais on a quand même dû prendre des cours de chant … Tu sais c’est pas parce qu’on rit beaucoup et qu’on s’amuse, qu’on ne travaille pas [Sourire] Effectivement il y a quelque chose de très théâtral et de très joué dans notre album. C’est pas la toute belle mélodie et tout et tout … [Sourire]


Tof : Et alors comment Philippe Katerine vous a-t-il découvertes ? Il est tombé sur vous sur myspace, on lui a signalé votre existence ?

Les Vedettes : Ca s’est passé avec le spectacle, mais aussi les deux chefs Jill et Agathe, connaissaient les musiciens de Philippe. Il y en a un qui nous a vu à Rennes et qui est revenu en disant « J’ai vu un truc, c’est vraiment tout à fait ça ! » Et puis lorsque Philippe est venu à Bruxelles on a demandé à avoir des places pour voir son concert, et il nous a carrément invitées pour faire une petite chorégraphie sur « Louxor » ! C’est comme ça que l’Amour est né entre nous et que, de fil en aiguille, on s’est retrouvées à faire 15 minutes de notre spectacle en première partie du sien à l’Olympia, puis le Zénith, et cette fameuse proposition de participation à l’Eurovision …

Tof : Parlons justement de « Papa est mort » cette chanson que vous deviez présenter à l’Eurovision (ça ne s’est pas fait finalement; ndlr). Je la trouve assez spéciale car bien qu’elle parle de la mort de Pinochet, on peut aussi la prendre à un degré différent, pour le coup carrément oedipien …

Les Vedettes : Mais bien sûr, chacun va voir ce qu’il veut y voir selon sa personnalité et son histoire, surtout qu’on ne cite jamais Pinochet ! Ca parle de toutes façons d’une certaine image paternelle.

Tof : Oui je trouve que cette chanson parle plus particulièrement aux gays, car vous n’êtes pas sans savoir que leurs rapports avec le père sont souvent tendus …

Les Vedettes : C’est vrai qu’on a l’impression qu’en général les homosexuels sont plus attachés à leur mère qu’à leur père, même si c’est une vision forcément réductrice. Peut-être que les gays se retrouvent plus dans cette chanson. En même temps certains vont voir cet aspect de la chanson, mais au même moment des filles vont voir les choses totalement différemment. Hey il y a aussi des pères super présents tu sais ! [Rire]

Tof : Comment s’est passée l’élaboration du projet avec Katerine ? Vous avez apporté les thèmes de chansons que vous vouliez traiter ? C’est lui qui vous a proposé des chansons ?

Les Vedettes : La chanson pour l’Eurovision a été notre toute première collaboration, partie sur un malentendu parce que lorsqu’il nous l’a proposée on avait compris qu’il s’agissait juste de danser derrière lui. Une semaine avant on s’est rendues compte que c’était bien nous qui devions chanter, donc on est allées très vite en studio. En se cotoyant je crois que vraiment on a réalisé que le courant passait. Les choses se sont faites très vite sans qu’on se pose de questions. Ensuite chaque projet était comme une surenchère du projet précédent. Rends-toi compte : pour nous, comédiennes bruxelloises (ou autres), l’Olympia c’était quand même énorme !!! Donc à chaque fois qu’on avait une proposition de ce genre on arrêtait pas de pousser des cris. C’était l’hystérie totale ! Katerine a écouté toutes nos conversations. On a passé quand même 15 jours dans le tour-bus avec lui et son équipe ! 15 jours de ville en ville, à partager des endroits super exigus, donc il a dû choper tout ce qu’il a pu. Beaucoup de choses dans les textes sont tirées de phrases qui ont été dites . « J’ai fait un rêve érotique avec Joey Starr » c’est vrai ! [Rires] C’est une des filles qui en a parlé dans le bus ! Pas un fantasme attention ! Franchement, toi, tu n’as jamais rêvé de quelqu’un, pour te dire en te réveillant « Ho lala j’ai fait l’amour avec untel alors qu’il n’est même pas mon genre » ? [Rires] Quasi tout l’album vient de chose qu’on a dites. « Tout le monde croit que je suis une lesbienne » c’est pareil ! Du coup on a aimé toutes les chansons et pour certaines on a franchement éclaté de rire ! On se reconnaissat totalement ! Pour le reste, on ne pensait pas du tout faire un album complet dès le départ. C’est vraiment parti du concept qu’on voulait chanter et faire la majorette. Les chansons ce sont accumulées, ce qui fait que ce disque une sorte de compilation … faite dans l’instant !

Tof : J’ai cru comprendre que vous auriez été embétées de participer à l’Eurovision …

Les Vedettes : Ben oui mais ça n’a rien à voir avec un apriori quelconque par rapport à ce qu’est l’Eurovision. On adore toutes ce concours ! Non, non … Déjà c’était très rapide, ensuite on ne chantait pas très juste, et puis on avait pas d’album ni quoi que ce soit derrière nous. On n’avait pas le temps non plus ! Ensuite on a été contentes de ne pas y être allé quand on a vu les autres concurrents. On nous aurait sans doute trouvées trop décalées, et on se serait dit « C’est quoi ces filles qui savent pas chanter ? » Et puis les Fatals Picards on adorait ! On s’était bien entendues avec eux d’ailleurs, et on avait même dansé sur scène …


Tof : Vraiment personne n’a eu de réticences par rapport aux textes ?

Les Vedettes : Si sur un truc qui n’avait rien à voir avec le cul … A un moment donné il y avait les termes juif et arabe qui se télescopaient dans une même phrase. Etant donné le ton que commençait à prendre notre album on a trouvé que c’était un peu too much. On assumait pas tellement de rentrer dans un débat comme celui-là.

Tof : Parlez-moi des références à l’homosexualité que comportent les textes …

Les Vedettes : Ben en fait il n’y en a qu’une, dans « Comme dit Daddy » ! Mais c’est vrai que le ton, qu’on emploie, la façon dont on parle des garçons, peut faire que ça parle assez bien aux gays. On peut aussi nous prendre pour des féministes alors qu’on ne l’est pas du tout ! Tu vois par exemple « Grand Con » pour nous c’est une chanson d’amour !

Tof : Je trouve qu’il y a quelque chose de très « Sex and the City » chez vous, et puis un grand message de tolérance …

Les Vedettes : Hey pas maaaal !!! Ben c’est-à-dire qu’on est des nanas entre 35 et 42 ans. Bon il y en a peut-être une qui a 34 mais on s’en fout on va la tuer [Rires] C’est clair qu’on n’a plus 20 ans, et donc on n’est pas des niaises. On ne nous fera pas dire n’importe quoi ! On est des filles libres ! Il ya aussi un peu quelque chose de la Drag Queen chez nous. Ce sont les mots d’un homme chantés par des femmes, mais filtrés par ses fantasmes, sa personnalité, par rapport à ce qu’il a entendu de nous … Ca reste quand même des mots à nous mais avec une touche masculine. Ca met une certaine distance et c’est appréciable, car on n’est pas que ce qu’on dit …

Tof : Il y a un franc-parler chez vous, qui m’a fait penser à celui de Yelle. J’ai l’impression qu’avec elle, on entend de plus en plus de filles se « libérer » au niveau du langage …

Les Vedettes : Bon on connaît assez peu ce qu’elle fait, mais on voit ce que tu veux dire. Je comprends pourquoi tu dis ça eeeeeeeeeeeet …………………………………voilà. [Gros éclat de rire] C’est vrai qu’elle a lancé un truc un peu olé-olé, où on dit des gros mots et tout ça, mais tu sais les filles elles sont comme ça, ils ne faut pas croire hein … [Rires] C’est peut-être ça qui fait peur aux mecs d’ailleurs ! Enfin ça dépend lesquels, parce que je me souviens d’une soirée à Bruxelles pour la communauté gay, et ils étaient très chauds ! Eux ? Même pas peur ! [Rires] Nous ce qu’on fait c’est pas si agressif, c’est même une nouvelle forme de romantisme. Tu vois quand on dit « J’aime baiser avec toi, grand con », c’est vraiment une chanson d’amour on est bien d’accord. Ce n’est pas vulgaire et effectivement il y a un coté cash et « Nouvelle poésie » … Ca vient aussi de l’univers de Katerine. Chez lui il y a toujours une tendresse pour l’être humain même s’il est con, même s’il dit « Je vous emmerde » . Toujours une poésie des choses, un décallage … C’est un homme intelligent qui a un vrai style. mas tu sais basiquement les mots « baiser » et « merde » sont de très beaux mots dans la langue française ! On adore …


Tof : Au niveau des sonorités vous avez pu mettre votre grain de sel ? Je pense par exemple à « Papa est mort », qui sonne très Beach Boys …

Les Vedettes : Les mélodies c’est Katerine. Après, l’univers un peu sixties correspond vraiment beaucoup à Agathe et Jill. Le coté Rock’n’Roll sixties c’est quelque chose qui existe chez chacune d’entre nous, ce sont des choses évidentes et pas provoquées par des volontés farouches. Chez nous les sixties, ça veut dire plutôt le coté Yé-Yé, tandis que pour les musiciens ça peut aller jusqu’aux Kinks ! Tu sais on n’a pas dit : « On voudrait que ce soit comme ça ou comme ça » c’est sorti naturellement …

Tof : Quel genre de mamans êtes-vous sinon ? Comment vos enfants vous voient-ils ?
Les Vedettes : On n’est pas que Rock’n’Roll, mais aussi des mamans sévères avec des principes. On s’inquiète pour eux comme n’importe quelle maman … Et puis les textes de certaines de nos chansons, MDMA par exemple, que tu peux trouver un peu « choc » , peuvent être un bon moyen d’entamer un dialogue avec eux. En même temps il faut savoir qu’ils sont souvent au courant de bien plus de choses qu’on ne le croit …. La marraine de mon fils est lesbienne, il est entouré de gens qui viennent du milieu artistique donc ce sont des enfants qui comprennent vite beaucoup de choses …

Tof : Vous êtes souvent en uniforme … ca a une signification particulière ?
Les Vedettes : Ca tient probablement un peu du fantasme. Toutes petites, on voulait être des majorettes, des mariées, des infirmières, des claudettes … Et puis le fait d’être toutes habillées pareil, ça nous booste … Le travestissement quel qu’il soit, que ce soit un masque ou un costume, est libérateur ! Dès que tu mets un nez de clown, c’est comme si tu te cachais, c’est complètement désinhibant ! Bon le costume de claudette n’est quand même pas toujours facile assumer mais on s’en arrange [Rires] On peut avoir de longues discussions avant un spectacle à ce sujet, mais une fois qu’on est sur scène, on oublie tout ça et on s’en fout ! L’effet de groupe, c’est aussi quelque chose de très désinhibant. Quand on est à 8 rend la chose devient beaucoup plus facile, et on a moins peur du ridicule !

Tof : Est-ce qu’il vous arrive parfois de vous engueuler ?
Les Vedettes : Mais bien sûr, tout le temps ! Il y a une règle n°1 chez les Vedettes, c’est de ne jamais quitter la pièce, parce qu’à partir du moment où tu t’en vas c’est qu’on va dire du mal de toi . Et donc la règle n°2 c’est de ne jamais quitter la pièce, et la règle n°3 : SURTOUT : Jamais quitter la pièce ! [Rires] Dès qu’on arrive on annonce « Attention je suis là je vous entends ! », mais on s’aime beaucoup aussi !

Tof : Question fête et spectacle, peut-on dire justement que les belges ont une sensibilité à part ?
Les Vedettes : On peut dire qu’ils ont moins peur du ridicule ! Les belges sont vraiment très autenthiques et aiment pratiquer l’auto-dérision très facilement, c’est peut-être un des aspects qui nous rapproche des gays d’ailleurs ! Evidemment ce sont des clichés, mais on pense que c’est assez vrai !

Tof : Merci pour ce beau moment passé en votre compagnie … Pour ceux et celles qui n’ont pas encore eu la chance de découvrir votre univers décalé et festif sur scène, rendez-vous sur les scènes de Belgique (c’est pas loin de Paris grâce au Thalys) et aussi pour quelaues dates en France !

Retrouve la Chronique de Disque n°1 [ ICI ]

Les Vedettes en concert :

Le 23 avril 2009 à 20h Foire d’Art contemporain (Showcase) de Bruxelles
Le 13 mai 2009 à 22h45 aux Nuits Botaniques de Bruxelles
Le 30 mai 2009 à 20h au Festival « Dans la Vallée », à Sainte-Marie aux Mines, Alsace
Le 13 juin 2009 à 20h au Festival Aucard de Tours, Pays de la Loire
Le 20 juin 2009 à 20h à la Fête de la Musique de Charleroi
Le 4 août 2009 à 20h au Theater Aan Zee Festival à Ostende
Le 22 août 2009 à 20h au Festival de Chassepierre
Le 23 août 2009 à 20h à Chassepierre

Plus d’infos sur myspace.com/vedettes

Crédits photos : Olivier Donnet

Lire les interviews précédentes de CitéGAY : Peter Von Poehl – Martin Rappeneau – Charlie Winston – Hélène Ségara – Benjamin Diamond – Lorie – Roisin Murphy – Enrique Iglesias – Calogero – Maroon 5 – Christophe Willem – Zazie – Jay Jay Johanson – A-Ha – Cerrone – David Guetta – Elodie Frégé – Duran Duran – Elli Medeiros – The Killers – Kim Wilde etc, etc …



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