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RoBERT :  »Je me sens tout à fait concernée par les préoccupations de mon public gay »

Voilà quelques jours que j’attends l’Appel de la Succube, et que je me languis tel l’insecte pris dans la toile d’une veuve, et qui attend le dénouement fatal. Celle qui tue, porte le nom du Mâle, dans ce qu’il a de plus intransigeant, brut et autoritaire, en l’occurrence celui de mon père . et ce prénom se pose là, comme pour mieux magnifier une fragilité à fleur de peau, sa peau de chimère, diaphane, qui tranche net avec les atours cinglants qu’elle arbore, souvent noir d’ébène ou rouge sang.
J’ai le sentiment de l’imminence d’un entretien glauque et morbide, acide à faire dont je ne sortirai certainement pas nickel, mais trop tard pour faire ma prière pour aller au paradis.
Et puis je l’imagine frêle, inoffensive, esquivant la goutte de pluie.
Elle se promène, ignorant le vent qui lui soulève les jupes, arborant un air mutin, s’asseyant à une table du café, et se questionnant : « n’y aura-t-il Personne ? »
Elle me trouvera peut-être triste et sale, voudra partir au bord des larmes.
C’est peut-être elle la malchanceuse.
Mais peut-être aussi me verra-t-elle paré des habits de son « Prince Bleu« , m’invitant derrière son miroir, là où les sorcières jacassent avec les elfes, semblant tout droit échappés d’un film de Tim Burton. Les couleurs, elle doit bien les voir à sa manière, question de philosophie.
Mon portable hurle à la mort et m’extirpe de mes pensées, manquant de me faire perdre l’équilibre, déjà bien précaire.
A l’autre bout du fil, la voix s’élève tel le Chant de la Lorelei : « Bonjour, c’est RoBERT, nous avons rendez-vous dans 10 minutes . ». « Oui j’arrive tout de suite. Je ne suis pas loin . » Le couperet va-t-il tomber ?

Tof : Bonjour RoBERT, j’ai tout d’abord une question concernant ton univers très particulier . J’ai l’impression qu’à travers ton expression artistique, tu donnes une nouvelle définition du romantisme. Je te trouve même un peu gothique. Qu’en penses-tu ?
RoBERT :
Et bien je ne m’attendais pas à ce qu’on attaque sur un sujet vaste et presque philosophique. C’est vrai que c’est une grande question [SOURIRE] : qu’est-ce que le nouveau romantisme ? On n’a sans doute pas suffisamment de temps pour y répondre brièvement.
Maintenant il y a sans doute une part de gothisme dans ce que je fais, car j’ai remarqué que j’avais beaucoup de fans gothiques, mais on ne peut pas dire que cela corresponde à une réelle volonté de ma part .

Tof : On sent chez toi une âme d’Artiste au sens très noble du terme, les périodes de promotion doivent être particulièrement pénibles non ?
RoBERT :
Oui j’ai du mal à me déplacer de ma province, mais ce n’est pas non plus insurmontable [RIRES].

Tof : Avec le récent succès de ton dvd Live à la Cigale, peut-on encore dire que tu es une artiste Underground et est-ce que cela te convient ?
RoBERT :
Oui, on peut toujours dire cela car vois-tu mes chansons ne correspondent toujours pas à ce qui est diffusé habituellement à la radio. En même temps c’est peut-être en train de changer car des diffusions du clip de « Personne », le premier single extrait de ce nouvel album « Six Pieds sous terre », sont prévues sur des chaînes musicales. Pour moi l’important réside dans les spectacles, rien ne vaut l’échange avec le public.


Tof : Tu as une grande part de public Gay… Cela vient de ton « affiliation » pas véritablement fondée à Mylène Farmer?
RoBERT :
Aaah Mylène !!! [RIRES] Tu sais en fait la comparaison ne me gêne pas, mais il faut bien dire que nous ne faisons pas du tout le même genre de musique, même si immanquablement on me rapproche à elle.

Tof : Te sens-tu proche de leurs préoccupations ? Penses-tu qu’ils se sentent concernés par les souffrances dont tu parles dans tes textes ?
RoBERT :
Peut-être. Tu sais d’une manière générale je pense que le public gay est plus apte à réfléchir sur les choses et à prendre du recul par rapport à ses expériences.
Je me sens tout à fait concernée par ses préoccupations oui, notamment en ce qui concerne la parentalité. Je suis même assez choquée par le débat actuel sur la question .
Il ne faut pas perdre de vue le fait que es référents sont en train de changer. On parle par exemple du fait que l’enfant a besoin d’un référent masculin et d’un référent féminin, et qu’il peut trouver celui qui lui manque dans l’entourage de la famille. Moi je pense même que dans un couple il y a toujours un des deux qui est féminin et l’autre masculin, pas besoin de chercher à l’extérieur ce qui manque.
Et puis il y a tellement d’enfants qui vivent avec un seul parent .

Tof : La pochette de ton nouvel album « Six Pieds Sous terre » est magnifique, qui en est à l’origine ?
RoBERT :
Merci ! C’est Vincent Mallea qui l’a réalisée. Il s’agit d’un artiste qui travaille avec nous depuis longtemps, et qui expose également. En principe je lui donne les bases de ce que je veux pour l’Artwork, le style de photo et d’univers que je veux représenter. Ensuite on décide des couleurs dominantes ensemble . Cette fois il a été un peu dépité lorsque je lui ai annoncé que la pochette de « Six Pieds Sous Terre » serait marron, ou ne serait pas. Et bien il l’a fait ! [SOURIRE]

Tof : Tu as commencé ta carrière un peu à cause du clip de « Marcia Baila des Rita Mitsouko. Qu’est-ce qui t’avais fasciné précisément à l’époque?
RoBERT :
C’est avant tout une chanson qui m’a marquée car je l’ai découverte juste après ma déception concernant ma carrière de danseuse qui a dû être stoppée. Et puis la façon de danser, très destructurée des protagonistes du clip m’avait interloqué. Le texte dramatique de la chanson m’avait bien sûr plu également, ça va de soi ! Et puis je me suis dit que la chanson serait sans doute pour moi un moyen d’expression qui pourrait être lié à la danse.

Tof : Parle-moi de la chanson « Hija De Puta » . J’ai été surpris de voir ces mots-là dans ta bouche .
RoBERT :
Surpris ? Mais je te rappelle qu’on m’appelle Robert ! [SOURIRE]
En fait j’ai écrit cette chanson pour casser certains apriori concernant les femmes, que je trouve insupportables. Je parle par exemple du tabou concernant la sexualité féminine, le plaisir et l’orgasme féminins, dans un univers définitivement machiste. Enfant j’ai été plutôt mal à l’aise par rapport à cela, je regardais sans cesse par terre pour éviter les regards. On semble oublier que l’acte de procréation passe aussi par le plaisir. Pour moi il n’y a pas de « Hija de Puta », comme dans ma chanson, je préfère crier haut et fort « Hija de Diva » pour rendre hommage à la femme, plutôt que de la dégrader !


Tof : Tu reprends magnifiquement une chanson de Marie Laforêt « Prière pour aller au paradis« , pourquoi cette reprise précisément ?
RoBERT :
En fait il n’y a pas de raison précise, à part que cette chanson m’avait marquée pendant mon adolescence

Comment s’est passée ta rencontre avec Gabriel Aghion ?
RoBERT :
Et bien c’est lui qui a souhaité réaliser le clip de « Personne », alors qu’il n’avait jamais fait ce genre de travail avant. Il ne me connaissait pas vraiment avant de m’avoir vu en photo, et il s’est intéressé à mon travail. Le clip a été tourné en 35 mm en Septembre dernier à Paris. Gabriel est devenu littéralement un fan car je crois comprendre qu’il est fou de cette chanson!

Tof : Le sujet qu’elle traite, c’est plutôt la Solitude, l’Absence . ?
RoBERT :
Oui peut-être… En fait c’est une chanson qui m’est très personnelle. Chaque phrase a été écrite avec minutie et renvoie à un sentiment qui me concerne. Et puis après je me suis aperçue que chacun y voyait un message différent. C’est plutôt une bonne nouvelle car se sont là les caractéristiques d’une chanson populaire [SOURIRE]

Tof : Entre nous, tu peux me le dire .Pourquoi cette fascination pour la Mort ?
On dirait qu’à travers tes textes, en la mêlant à un univers féérique, tu cherches à la rendre séduisante . ?
RoBERT :
Il y a eu beaucoup de meurtres dans mon histoire, mon travail est très sombre à cause de cela et probablement que « l’avortement » de ma carrière de danseuse y est pour quelque chose.
Il faut bien parler de la Mort car c’est quelque chose qui nous concerne tous. Un sujet qui ne doit pas rester tabou, il faut vraiment en parler car elle fait tout simplement partie de la vie. Le titre « Six Pieds Sous Terre » est évocateur, il renvoie à cette image. Mais j’ai voulu aussi exprimer l’idée que la terre est aussi un endroit riche, où on peut trouver des trésors. Je te rassure, dans la vie je suis plutôt joyeuse, et contrairement aux apparences je vis avec mon temps, suis sensible aux questions politiques et assez consommatrice de télévision ! [SOURIRE]

Tof : L’album contient aussi la chanson « Ta Femme, Ton Drapeau » qui parle d’amours saphiques .
RoBERT :
Oui c’est un peu une réponse à l’époque où Amélie Nothomb a écrit le Robert des Noms Propres, et quelques textes pour mon album précédent. Nous étions toujours ensemble, si bien qu’on nous a pris pour un couple alors qu’il n’en était rien. Nous n’avions pas de raison de démentir car pour nous ce n’était pas une insulte. D’ailleurs tu peux toujours écrire que ce n’était pas vrai, je suppose que la rumeur continuera de persister [SOURIRES]
Et puis j’ai remarqué que parmi mon public il y avait des femmes qui s’aimaient. J’ai eu envie d’écrire la chanson « Ta Femme, Ton Drapeau » pour faire « comme si » .

Tof : La vente du livre du « Robert des Noms Propres », directement inspiré de ta vie, a-t-elle eu un impact sur la vente de tes disques ?
RoBERT :
Et bien pas vraiment, je pense que le public de lecteurs n’est pas le même que celui qui écoute des disques.

Tof : De ton look, ton image, au décor et au mobilier de tes spectacles en passant par tes clips, tout est très étudié, très esthétique et sophistiqué .
RoBERT :
Oui mais ce n’est pas toujours prémédité très longtemps à l’avance, c’est plutôt quelque chose d’instinctif. Pour le spectacle de la Cigale par exemple, j’ai eu un coup de cour en passant devant une boutique de mobilier, seulement un mois avant le concert. Le décor a été conçu très vite.

Tof : Tu te sens plutôt Sorcière ou plutôt fée ?
RoBERT :
Je préfère être une sorcière, mais pour moi une sorcière n’a rien de mauvais. Ce qui me plaît chez elle, c’est son aspect plus créatif. Il y a la magie noire et la magie blanche. Une fée c’est nettement plus fade ! [SOURIRE]

Tof : Tu as eu quelques expériences au théâtre, dans des téléfilms et au cinéma, notamment dans « Le voyage en douce » de Michel Deville, est-ce que tu reviendras un jour à ces activités ?
RoBERT :
Franchement j’ai fait ces expériences étant jeune et cela ne m’a pas fait chavirer outre mesures. Ce sont pour moi des activités moins créatives que mon métier de chanteuse, qui mêle d’ailleurs à la fois chanson, danse et comédie. Je serais encore éventuellement partante pour du théâtre.

Tof : Il y a un an à la sortie d’ « Unutma », tu as eu un gros coup de cour pour la Turquie. Y a-t-il un autre coup de cour que tu as envie de nous faire partager ?
RoBERT :
La Turquie m’a vraiment beaucoup séduite, au point que lorsque je m’y rends, j’ai l’impression de revenir chez moi. Du coup j’ai enregistré une version turque du Prince Bleu. Et puis mon mari s’appelle Matthieu Saladin et Saladin est un nom de là-bas ! J’ai très envie d’enregistrer un prochain album dans ce pays .

Tof : Je t’ai découvert avec le projet du « Prince Bleu« , peux-tu m’en parler brièvement…?
RoBERT :
Ce projet était passionnant mais il n’a pas bénéficié d’une couverture radio. Le clip en film d’animation 3D a cependant été largement diffusé sur M6. Je l’ai enregistré avec Majandra Delfino, de la série « Roswell ». C’était très intéressant de mêler ma voix aigue à sa voix grave.

Tof : RoBERT, on te retrouve le 5 Février à l’Olympia, pour fêter une carrière déjà longue de 15 ans. Y aura-t-il des surprises ?
RoBERT :
Chuuut, je ne peux rien te dire pour le moment, à part que je vais sans doute utiliser un écran géant, pour le reste il faudra venir me découvrir ! [SOURIRE]

La belle doit reprendre sa liberté et je n’ai d’autre choix que de la laisser s’envoler. Déjà sa voix me manque mais je sais où la retrouver. Pas dans une forêt ou un caveau abandonné, ni dans la pénombre d’un champs fraichement taillé. La malchanceuse, mais pas vraiment en merdeuse répandra son aura sur la Scène de L’Olympia. On y est presque déjà !



RoBERT sera en concert à l’OLYMPIA le 5 Février 2006

L’album « Six Pieds Sous Terre » est dans notre Boutique Musique

Exclu CitéGAY : Découvre le clip de PERSONNE

Visite également le site officiel de RoBERT, et le site de Vincent Mallea, l’illustrateur à l’origine de l’ArtWork de l’album…

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