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A la recherche de la biologie de l’homosexualité

La génétique peut-elle jouer un rôle dans notre orientation sexuelle ? C’est la question à laquelle a tenté de répondre le docteur en psychologie Michel Bailey lors d’une conférence. Doit-on craindre la thèse du caractère biologique de l’homosexualité ? Pour Peggy Sastre, auteure de « Ex Utero » et « No Sex », les angoisses qui entourent ces recherches sont exagérées.

Voici quelques jours, une conférence donnée à Chicago par le psychologue Michael Bailey, et rendant compte de l’état de ses recherches les plus récentes sur la biologie de l’homosexualité masculine relançait le débat sur « le gène gay ».

En l’espèce, la presse s’est particulièrement emballée sur une étude – non encore terminée et, de fait, non encore publiée -, réalisée en collaboration avec Alan Sanders, Khytam Dawood et Elliot Gershon, et situant, grâce à une cohorte de 400 jumeaux, cette prédisposition génétique sur un locus précis du chromosome X, le Xq28.

Des recherches qui donnent du grain à moudre aux homophobes ?

Si vous suivez un peu la question, la chose ne vous étonnera pas, vu qu’il s’agit du même marqueur génétique que Dean Hamer avait isolé dans sa célèbre étude de 1993. Chercheur affilié, à l’époque, aux Instituts nationaux de la santé américains (NIH), Hamer (et son équipe) avait trouvé que ce marqueur s’observait un peu plus fréquemment chez les homosexuels mâles que dans le reste de la population. Et, bien qu’un marqueur ne soit pas à proprement parler un gène, mais plutôt une petite variation d’écriture au sein d’un gène, la découverte avait fait le tour du monde, sonnant le départ de la chasse aux gènes homosexuels – et des débats attenants.

Pour la résumer à grands traits, une partie de ce débat (voire de la « controverse ») consiste à dire que de telles recherches sont dangereuses en ce qu’elles donnent du grain à moudre aux homophobes qui pourraient, à terme, concevoir un « dépistage » génétique de l’homosexualité et chercher à éradiquer dans l’ouf un comportement qu’ils considèrent comme une tare.

C’est, par exemple, l’avis du journaliste Nick Cohen, publié dans « le Guardian » : « Si vous applaudissez des recherches disant que l’homosexualité résulte d’un héritage génétique, ne soyez pas surpris quand ils se mettront à vous proposer un ‘traitement' », avertit-il.

Et, en effet, ça fait très peur. Heureusement, l’angoisse est un tantinet exagérée, si ce n’est parfaitement absurde.

Critiquer ces hypothèses scientifiques n’a pas de sens

De un, et c’est peut-être là l’essentiel, ce n’est pas demain l’avant-veille que des recherches comme celles menées par Michael Bailey ou Dean Hamer permettront de « dépister » l’homosexualité. Au mieux du mieux, tout ce qu’elles permettront de « trouver », ce sont des prédispositions génétiques. C’est déjà énorme, mais c’est loin d’expliquer toute l’histoire. De fait, en l’état actuel de nos connaissances, l’homosexualité masculine se fonde entre 30 à 40% sur des facteurs strictement héréditaires et les « déterminants » de l’orientation sexuelle relèvent d’un mélange complexe et inextricable d’éléments génétiques, hormonaux, environnementaux ou encore sociaux.

De deux, comme le fait pertinemment remarquer Tom Chivers, du « Telegraph », critiquer des hypothèses scientifiques sous prétexte que des délires haineux pourraient en tirer profit n’a pas grand sens.

Le propre d’un délire haineux, c’est qu’il trouvera toujours une raison de justifier et d’alimenter sa propre existence. Les homophobes n’ont pas attendu que la science mette en lumière des prédispositions génétiques à l’homosexualité pour avoir envie de l’éradiquer, que ce soit à coup de gourdin ou de « stages » de rééducation.

Crédit Photo : Pancarte à la Gay Pride de Toulouse, en 2011 (Guillaume Paumier sur Flickr)

Source : Nouvel Obs



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